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Préciser et communiquer sa vision : c’est devenu presque cliché. Le genre d’exercice auquel se prête toute entreprise un peu sérieuse. Des mots et des icônes. Et des visions qui s’additionnent, ici et là : diverses, contradictoires, séparées. 

 

Et si on se donnait une vision, en tant que communauté, en tant que société ? Un projet commun et totalisant, une direction... pour guider nos gestes et nos choix, donner du sens à nos vies, nous projeter en avant... pour avancer fiers et droits. 

 

En cela (et en bien d’autres choses...), les peuples autochtones nous inspirent énormément.  

 

Voici la vision que nous avons pour nous tous. 

Écologie

C’est la chose qui va de soi et qui ne devrait même pas constituer un élément de la vision. C’est le principe de base, indiscutable tellement évident. On ne tue pas sa mère, comme on ne tue pas sa terre-mère. 

 

Mais nous venons d’où nous venons : de cette culture qui a séparé Humain et Nature, qui doit maintenant trouver le chemin par lequel elle les reliera dans un grand tout. Et surtout trouver le chemin par lequel elle apprendra à redonner à l’Humain sa juste place dans ce grand tout. 

 

En tant que fermiers, nous avons la chance d’avoir un lien direct et quotidien avec la terre. D’y être connectée à un point tel que nous voyons, que nous sentons, les effets que nous avons sur elle.  

 

La question au cœur de notre quête : comment est-ce qu’on se nourrit en équilibre avec la nature ? 

 

 

Laisser plus de place au Sauvage 

 

Nous avons développé une alimentation composée en grande majorité de plantes annuelles (blé, riz et maïs – 3 plantes annuelles – représentent à elles seules 60% de l’alimentation mondiale), cultivées de surcroit (il existe des plantes annuelles sauvages, mais elles font très peu partie de notre alimentation commune). Elles nous obligent à beaucoup de travail, en plus d’accaparer d’immenses superficies de terres, de manière très contrôlée, simplifiant forcément l’écosystème qui y règne (moins d’espèces de plantes, d’insectes, d’animaux...). 

 

Une alimentation en harmonie avec la nature doit faire plus de place aux milieux sauvages ! 

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La terre des Bontés de la Vallée, au moment de son acquisition en 2007, était complètement dégagée : l’ancien propriétaire la fauchait en entier à chaque année. Aujourd’hui, en y mettant les pieds à partir du chemin d’entrée, nous ne voyons plus jusqu’où elle s’étire. La végétation a poussé entre chaque parcelle cultivée, créant un patchwork où se côtoient sauvage et cultivé, travail des hommes et chants des oiseaux perchés 😊. Les espèces pionnières s’y sont implantées (bouleaux, peupliers, saules...). Dans une dizaine d’années, la hauteur des arbres sera encore plus grande, et d’autres espèces seront apparues. 

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Aménager un territoire nourricier 

 

La nature est capable d’une régénération par elle-même, mais elle a aussi besoin de notre aide, à nous humains. Comment peuvent pousser les noisetiers, qui couvraient autrefois abondamment les terres du Québec, si on ne trouve plus aucun de leurs fruits dans les sols ? C’est à nous de les planter ! 

 

Depuis 2013, nous poursuivons cette mission. Les premières années ont surtout été des années d’apprentissage : beaucoup d’erreurs, beaucoup de pertes parmi les arbres et arbustes implantés. Les enseignements ont été reçus : c’est aujourd’hui près de 1500 arbres à fruits et à noix, presque tous indigènes, qui poussent sur notre terre. Noyers, chênes, pruniers, cerisiers, châtaigniers, paw-paw, sassafras... Ce sera de toute beauté dans une dizaine d’années, lorsqu’ils auront atteint une taille respectable et qu’ils commenceront à nous faire don de leurs fruits.  

 

 

 

Cultiver nos plantes annuelles d’une manière écologique 

 

Il demeure que l’alimentation est liée à une culture, à des souvenirs... Elle tient de l’expérience partagée, elle est liée à nos sens. Il est difficile de la transformer radicalement. On veut continuer à manger nos plantes annuelles préférées : tomates, carottes, concombres, brocolis... Le défi est donc de cultiver ces plantes de manière écologique : sans épuiser le sol, sans polluer l’eau de pesticides et engrais chimiques, etc.   

 

Nous sommes chanceux, plein de gens ont ouvert la voie. Nous pensons entre autres au mouvement Soil Health aux États-Unis, au mouvement d’agriculture régénératrice qui s’amplifie mondialement depuis quelques années.  

 

Nous tentons dans nos champs de respecter 5 principes, inspirés de la nature : 

  • Le sol n’est pas travaillé mécaniquement; 

  • Le sol est couvert; il n’est pas à nu; 

  • Grande diversité de plantes; 

  • Le sol est gardé vivant sans interruption (présence de racines vivantes en permanence); 

  • Les animaux font partie de l’écosystème. 

 

Nous souhaitons continuer à le faire, tout en restant ouverts à l’amélioration de nos pratiques.

Santé

Nous sommes soucieux de la santé de l’écosystème tout comme nous sommes soucieux de la santé humaine. Il nous apparaît évident que les deux vont de pair, qu’en veillant sur la première, l’autre y gagne. 

 

Les recherches en santé des sols montrent qu’avec une grande diversité d’êtres vivants dans le sol (bactéries, champignons, vers de terre, etc.) apparaissent des fonctions du sol: aération, rétention de l’eau, auto-fertilité, etc. L’écosystème devient alors plus robuste, capable d’affronter les ennemis vivants (virus, insectes ravageurs...) autant que les événements climatiques (fortes pluies, longue sécheresse...). 

 

Les aliments issus de cet écosystème sont eux-mêmes plus sains, ayant bénéficié de tout le réseau d’êtres vivants du sol, dont ils ont su tirer une diversité de phytonutriments essentiels à notre santé. 

 

Plus l’écosystème «â€¯sol » sera en santé, plus il sera capable de s’autoréguler, moins nous aurons à intervenir sur lui. 

 

Nous rêvons, à grande échelle, d’une agriculture naturelle, saine, qui mise sur la force de la biologie du sol (ce riche réseau de vies), pour nourrir et garder en santé les humains que nous sommes.  

Communauté

Être liée à la communauté que nous nourrissons est d’abord pour nous un grand bonheur. Une dimension vers laquelle nous nous sommes naturellement tournés, depuis les débuts de la ferme. Rencontrer à chaque semaine tous les gens que nous nourrissons, échanger avec eux, se sentir liés… quelle joie ! Produire des légumes et les vendre à un distributeur n’aurait aucun sens pour nous. L’élan vers la communauté en est donc un de cœur d’abord.

 

Au fil des années, nous avons aussi vécu ce lien comme nécessaire. Le monde de la ville et le monde de la campagne se sont tellement éloignés dans les dernières décennies, entraînant méconnaissance voire indifférence de part et d’autre. Les agriculteurs sont particulièrement isolés, seuls sur leurs terres, et il est triste que le fruit de leur travail soit réduit à quelques aliments impersonnels sur des tablettes d’épicerie, n’offrant que leur apparence et leur prix comme unique témoignage. Nous sommes chanceux d’avoir ce contact direct avec les « mangeurs »; il ouvre la porte à une meilleure compréhension, à un changement de perspective…

 

Puis, la difficulté de rentabiliser les opérations de la ferme et de nous dégager un salaire un tant soit peu raisonnable, dans toute cette aventure, nous a fait tendre vers cette nouvelle évidence : la communauté DOIT soutenir la mission de la ferme. C’est au bénéfice de tous. À celui des fermiers, bien sûr, pour qu’ils poursuivent leur travail; à celui de la communauté, pour qu’elle continue à être bien nourrie; et au bénéfice d’une communauté plus large encore, qui gagne certainement à ce que la ferme ait des pratiques écologiques sur son territoire, qui gagne à ce que les savoirs agricoles soient gardés vivants et puissent être transmis...

 

C’est carrément un nouveau « contrat social » que nous imaginons entre la ferme et sa communauté. Une sorte de soutien inconditionnel, de part et d’autre, qui prend appui sur cette conviction partagée que ferme et communauté sont plus fortes ensemble.

 

Et dans cet engagement de l’une et l’autre, qui rend possible ce qui ne l’était pas avant, il y a cette révélation fondamentale : nous avons du pouvoir !! Nous nous prenons en main, enfin ! Nous sortons de cette posture paralysante : victimes d’un système que nous n’avons pas choisi, sur lequel nous croyons n’avoir aucun pouvoir. En 2024, c’est un sentiment assez nouveau, et qu’on gagnerait à cultiver d’ailleurs, dans toutes les sphères de nos vies !

 

Remettre la communauté au cœur de l’agriculture et de l’agroécologie part aussi du principe qu’il faut se reconnecter à la terre si on veut être en mesure de la guérir. C’est la grande mission de notre époque. Dans son magnifique ouvrage Tresser les herbes sacrées, Robin Wall Kimmerer (botaniste, professeure émérite et amérindienne issue de la nation Potawatomi aux États-Unis) explique que la restauration de nos écosystèmes dégradés passe nécessairement par la restauration de notre relation à eux.

 

En ce sens, notre idée de faire intervenir la communauté est loin d’être dans le seul but de soutenir la ferme et ses opérations : c’est aussi d’offrir cet espace – bien concret – qui permettra à la communauté de ré-établir une relation avec le milieu naturel.

 

« Restaurer la terre sans restaurer la relation n’a pas de sens. Car c’est la relation qui perdurera et nourrira la terre restaurée. C’est pourquoi reconnecter l’homme au paysage est aussi essentiel que de rétablir une bonne gestion des ressources en eau ou d’éliminer les contaminants d’un lac. Tel est le remède pour guérir la Terre.

[...]

Joanna Macy parle du Grand Tournant, "l’aventure essentielle de notre époque; le passage de la société de croissance industrielle à une civilisation dédiée au maintien de la vie et du vivant". La restauration de la terre et de notre relation à elle fait tourner cette roue. "L’action en faveur de la vie transforme. La relation entre soi et le monde est réciproque; la question n’est pas d’être informé ou sauvé et seulement ensuite d’agir. Pendant que nous travaillons à guérir la terre, la terre nous guérit." » (Tresser les herbes sacrées, pp. 460-462)

 

La communauté que nous souhaitons est multiple. Comme pour la santé des sols, nous croyons à la pluralité au sein de la communauté, comme condition même de sa santé. Plus les membres de la communauté sont variés, provenant d’horizons différents, ayant des qualités et des compétences différentes, plus la communauté sera forte et résiliente. Et belle et émouvante... parce que bigarrée mais pourtant unie.
 

Équité

C’est la base de tout projet collectif. Dès lors qu’on se met en commun, on a le devoir de veiller à l’équilibre des parties, au respect de chacun. Il en va de la santé du groupe, de sa viabilité à long terme. Si quelqu’un y voit là une option, un principe facultatif, alors il vaut mieux faire un projet en solitaire ! 

 

Dans le projet de ferme communautaire, le principe d’équité se traduit par : 

  • une équité financière entre les fermiers et la communauté : le financement adéquat de la ferme repose sur l’ensemble des parties – fermiers et communauté – et il inclut des salaires décents pour les fermiers; 

  • une équité financière entre les membres de la communauté : chacun contribue à la hauteur de ses moyens; la capacité de payer est répartie sur l’ensemble de la communauté plutôt que sur chaque individu isolément. 

Éducation

A venir dans les prochains jours

Spiritualité

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Pérennité

A venir dans les prochains jours

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